Oui, il n’y a pas d’autres choix que d' avancer courageusement et plein d’espoir, sinon mourir là . Mais tu ne veux pas mourir, tu n’es pas arrivée jusqu’ici pour abandonner. Tu n’as pas vécu toutes ces histoires , ces rebondissements, tu n’as pas traversé tous ces paysages , saisit tous ces parachutes pour crever ici au milieu de nulle part dans ce désert . Tu vas marcher coûte que coûte vers ce qui semble être une oasis . C’est un ciel clair rempli de l’éclat d'une lune énorme. Sa lumière inonde l’immensité. C’est un ciel plein d’étoiles. Il fait froid, l’air est vif. Il te faut profiter de cette lumière pour avancer. Avancer avant que le jour se lève , que le soleil ne te rende vulnérable , avancer sans être vue … Tu déchires ton foulard pour te protéger les pieds de ces pierres anguleuses qui jonchent le sol. Tu prends une grande inspiration et go ! go ! go ! Tu as presque envie de courir tant l’impatience te prend le ventre, tant la curiosité te pique. Dans cette nuit diaphane, seuls le bruit de tes pas sur les cailloux et celui de ton souffle court, brisent le silence . Lorsque tu t’arrêtes on entendrait presque la terre tourner. Silence Soudain … tu entends un frémissement , comme une brise , puis un bruit sourd surgit … il vient de loin . Au fil de tes pas , çà se rapproche . Le frémissement lentement se transforme , puis devient vrombissement . Tu marches . Maintenant c’est un halo poussiéreux que tu perçois au très loin . Tu stoppes net pour écouter. Est-ce ton imagination ? Est-ce la faim et la soif qui te taraudent qui transforment ta perception du réel ? Tu reprends la marche , tu accélères, tu n’as plus mal aux pieds, tu veux voir ce qui approche … c’est encore trop loin, trop confus . La masse poussiéreuse semble grossir . Le vrombissement s’intensifie, se fait plus grave . L’air siffle . Tu te mets à plat ventre , les bras en croix , une oreille collée au sol . Ton corps tout entier est secoué par la vibration.. Qu’est-ce que c’est ? La terre tremble . Que faire ? A 360° il n’y a nulle part où aller pour s’abriter . Tu décides d’avancer, continuer et tu te dis intérieurement : « Je n’ai pas peur ! Non !!! je n’ai pas peur !!! tu marches , tu cours et tu n’as pas peur et tu te le répètes encore et encore . La masse poussiéreuse remplit maintenant l’horizon, le vrombissement se fait assourdissant . Des silhouettes se dessinent , le vrombissement c’est un galop … Des chevaux , des dromadaires aussi ou seraient-ce des chameaux ? Des cris ! tu entends des cris , c’est çà ! des cris qui impulsent les montures. Ce sont des cris de femmes . Elles sont des centaines toutes voiles dehors qui jaillissent de la poussière . Le spectacle est impressionnant, puissant, grandiose, imposant, saisissant ! Le galop se rapproche, devient trot et la horde finit par s’arrêter à quelques dizaines de mètres de toi. Tu restes là, bouche bée, étourdie , ébahie face à tant de majesté. Il y a là tous les peuples de la terre, sous tes yeux , réunis. Des femmes, il n’y a que des femmes . Alors que lentement la pluie de lune fait place à la douceur de l’aube, la diversité des costumes, des coiffes , des tatouages et des montures contraste avec la nudité du décor . La richesse des regards et des attitudes, ensemble sous la même bannière paisible est éblouissante. Le cliquetis des bijoux danse avec le souffle haletant des pur-sang . Unité . Une gazelle se dirige vers toi et te tend un alezan . Sans un mot , tu t’exécutes et au son de stridents « yaaah, yaaaah !!! » tu t’envoles avec elles dans ce flot de poussière , de musc et de chair . Où vas-tu ?… Qu’importe ! Tu entendais des cris ? Là, tu entends leurs chants. Ce sont les chants du ciel et de la terre , qui ensemble mais pas à l’unisson appellent à l’aube nouvelle dans la folie du monde. Après des heures, peut-être des jours et des nuits , le galop devient trot . Puis, un matin, le voile de poussière se dissipe … tu entres Texte écrit pour "l'Échappée Intérieure" Projet initié par la Comédie de Valence en Mai 2020
L'Échappée Intérieure
Dernière mise à jour : 18 août 2021
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